Alain Lipietz à Montluçon : l’écologie ou le remède anti-crise

Alain Lipietz, économiste et ancien eurodéputé d’Europe-Écologie Les Verts, était lundi 9 janvier, salle Salicis, à Montluçon.

A quoi attribuez-vous la crise que nous traversons ?

Cette crise découle des emprunts, des investissements faits dans les années 2000 et ne serons jamais remboursés. Certains États ont diminué les impôts des riches pendant les années de vaches grasses en se disant que les pauvres paieraient pendant les années de vaches maigres. Ces années sont arrivées mais les pauvres n’ont plus les moyens de payer la dette découlant des baisses d’impôts adoptées par Jean-Pierre Raffarin, Nicolas Sarkozy et même Laurent Fabius. Le modèle ne marche plus et cette dette pèse sur tout le système mondial.

Quelles solutions proposez-vous ?

 Supposons qu’on abolisse la dette d’un coup de baguette magique. On ne pourrait pas reprendre comme avant car le modèle qu’on avait développé de 1980 à 2010 était fondé sur le productivisme : on prêtait de l’argent aux classes moyennes appauvries pour qu’elles consomment. Mais si tout le monde continue, il n’y aura pas assez de ressources naturelles. Si on reprend le même modèle qu’au début des années 2000, on aura exactement la même crise qu’en 2007, avec une envolée du prix des énergies. Nous, écologistes, pensons qu’il faut rééchelonner la dette mais pas recommencer comme avant.

L’écologie constitue-t-elle une piste viable ?

En luttant contre l’effet de serre, on créera énormément d’emplois : 650.000 en France d’ici 2020 si on veut tenir nos engagements de réduction de 30 % des gaz à effet de serre. Si on veut sortir du nucléaire, on sera obligé de travailler sur l’isolation des bâtiments, les transports en commun… Dans l’Allier, nous sommes dans une région d’agriculture intensive. À l’avenir, nous allons devoir fonder une agriculture de proximité et développer la production de protéines végétales pour nourrir tout le monde et diminuer les émissions de gaz à effet de serre. Tout cela, c’est assurer largement l’emploi pour les trente ou quarante prochaines années en faisant reculer les deux crises qui nous ont mis dans la m…

La crise fait peur. Est-ce de nature à diluer le message écologiste ?

Tout à fait. Je publie demain (hier, NDLR) un article intitulé « 1932-2012 ». On est exactement dans la même situation aujourd’hui qu’en 1932 dans le monde. À l’époque, les États-Unis ont choisi Roosevelt et le New-Deal et l’Allemagne a choisi Hitler et le nazisme. Cela s’est terminé par une guerre. En 2012, il va falloir choisir entre les solutions autoritaires et la solidarité. La solution autoritaire est beaucoup plus facile, celle de Roosevelt qui demandait aux gens de faire l’effort de créer des coopératives, de se syndiquer, est beaucoup plus exigeante. C’est le message des écologistes, même si les solutions que nous proposons pour sortir de la crise ne sont pas celles des années 1930. Mais c’est vrai qu’il nous faut un Roosevelt, on n’a pas besoin de politiciens » gnagnan ». Il faut des gens comme Éva Joly, qui n’ont pas froid aux yeux.

Propos recueillis par T. Ollivier

– Source : La Montagne

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